
L'histoire du Liban explique la crise que vit le Liban depuis des décennies selon Xavier Baron (photo: F.Dubessy)
econostrum.info: Comment expliquez-vous la situation actuelle du Liban ?
Xavier Baron: Elle est la mauvaise utilisation, la déformation, d'un système qui existait avant la naissance d'un Liban moderne. Après la guerre civile (NDLR: 1975 à 1990), une classe politique composée en partie des anciens chefs de milices lors du conflit ont été mis en place et dirigent le pays. Ils ont déviés des règles appliquées avant 1990 et qui étaient déjà des règles communautaires, mais qui ont bien fonctionné avec certains. Après 1990, le Liban est devenu un État néo-patrimonial, c'est à dire dans lequel les hommes politiques et les fonctionnaires considèrent que l'État c'est leur affaire et que les finances publiques leur appartiennent. Et comme chacun représente une communauté, tout devient ingérable.
Dix-huit communautés sont officiellement reconnues au Liban, dont onze chrétiennes. Ce n'est pas écrit, mais, depuis 1943 et le Pacte national libanais (NDLR: régissant la coexistence entre les différentes confessions), le président de la République est chrétien maronite, le Premier ministre sunnite, le président du Parlement chiite, et le vice-président de la Chambre des députés et du Conseil des ministres Druze. Les postes de la fonction publique sont répartis en fonction de l'importance supposée, car le dernier recensement, effectué par les Français, date de 1932, de chacune des communautés. Elles sont la charpente de l'État et l'État repose donc sur elles.
Si les accords de Taëf, signés en Arabie saoudite en 1989, ont l'avantage d'avoir mis fin à la guerre civile et d'avoir assuré l'indépendance du pays, ils ont par contre confirmé le partage des postes clefs entre les trois plus grandes communautés religieuses. Et instauré la pratique de laisser aux ministres le soin de nommer les fonctionnaires de leur département, forcément de leur clan.
Xavier Baron: Elle est la mauvaise utilisation, la déformation, d'un système qui existait avant la naissance d'un Liban moderne. Après la guerre civile (NDLR: 1975 à 1990), une classe politique composée en partie des anciens chefs de milices lors du conflit ont été mis en place et dirigent le pays. Ils ont déviés des règles appliquées avant 1990 et qui étaient déjà des règles communautaires, mais qui ont bien fonctionné avec certains. Après 1990, le Liban est devenu un État néo-patrimonial, c'est à dire dans lequel les hommes politiques et les fonctionnaires considèrent que l'État c'est leur affaire et que les finances publiques leur appartiennent. Et comme chacun représente une communauté, tout devient ingérable.
Dix-huit communautés sont officiellement reconnues au Liban, dont onze chrétiennes. Ce n'est pas écrit, mais, depuis 1943 et le Pacte national libanais (NDLR: régissant la coexistence entre les différentes confessions), le président de la République est chrétien maronite, le Premier ministre sunnite, le président du Parlement chiite, et le vice-président de la Chambre des députés et du Conseil des ministres Druze. Les postes de la fonction publique sont répartis en fonction de l'importance supposée, car le dernier recensement, effectué par les Français, date de 1932, de chacune des communautés. Elles sont la charpente de l'État et l'État repose donc sur elles.
Si les accords de Taëf, signés en Arabie saoudite en 1989, ont l'avantage d'avoir mis fin à la guerre civile et d'avoir assuré l'indépendance du pays, ils ont par contre confirmé le partage des postes clefs entre les trois plus grandes communautés religieuses. Et instauré la pratique de laisser aux ministres le soin de nommer les fonctionnaires de leur département, forcément de leur clan.
"La solution est de renouveler la classe politique"

"Les Libanais sont des gens formés", insiste Xavier Baron confiant sur leur capacité à relever le pays (photo: F.Dubessy)
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Tout le mal vient-il donc de ce système communautariste ?
X.B.: Non, pas du tout ! Si le communautarisme était supprimé demain, même si à mon avis c'est impossible, le problème demeurerait. Tout simplement car la classe politique resterait en place. De toute façon, les Musulmans sont contre et je ne suis pas certain que les autres Libanais soient pour. Mais, on pourrait l'aménager. Je ne vois pas en tout cas la porte de sortie dans la suppression du communautarisme.
La solution est de renouveler la classe politique, de changer les mœurs politiques. La crise actuelle a pour origine l'endettement, la liberté bancaire et les pratiques de la Banque centrale du Liban qui rachète, comme dans une pyramide de Ponzi, les dettes du pays avec les dépôts des épargnants.
C'est la vraie question. Les Libanais sont descendus dans la rue en octobre 2017 pour demander le départ de tous les politiques actuels, mais existe-t-il vraiment une alternative, des visages nouveaux pour les remplacer ?
X.B.: Ça ne peut pas être pire que maintenant ! Les Libanais sont des gens formés, d'ailleurs quand ils viennent en occident ils n'ont aucun problème d'adaptation. On peut aussi penser qu'un certain nombre de Libanais installés à l'étranger, voyant que la situation s'améliore, reviendraient au Liban. Ceci ne fait aucun doute. Je suis convaincu que les personnes bien formées dans les institutions internationales pourraient proposer autre chose.
X.B.: Non, pas du tout ! Si le communautarisme était supprimé demain, même si à mon avis c'est impossible, le problème demeurerait. Tout simplement car la classe politique resterait en place. De toute façon, les Musulmans sont contre et je ne suis pas certain que les autres Libanais soient pour. Mais, on pourrait l'aménager. Je ne vois pas en tout cas la porte de sortie dans la suppression du communautarisme.
La solution est de renouveler la classe politique, de changer les mœurs politiques. La crise actuelle a pour origine l'endettement, la liberté bancaire et les pratiques de la Banque centrale du Liban qui rachète, comme dans une pyramide de Ponzi, les dettes du pays avec les dépôts des épargnants.
C'est la vraie question. Les Libanais sont descendus dans la rue en octobre 2017 pour demander le départ de tous les politiques actuels, mais existe-t-il vraiment une alternative, des visages nouveaux pour les remplacer ?
X.B.: Ça ne peut pas être pire que maintenant ! Les Libanais sont des gens formés, d'ailleurs quand ils viennent en occident ils n'ont aucun problème d'adaptation. On peut aussi penser qu'un certain nombre de Libanais installés à l'étranger, voyant que la situation s'améliore, reviendraient au Liban. Ceci ne fait aucun doute. Je suis convaincu que les personnes bien formées dans les institutions internationales pourraient proposer autre chose.
"Confiant sur la qualité des Libanais"

Xavier Baron était l'invité de Jean-François Coustillière, président de l'association Euromed-IHEDN (photo: F.Dubessy)
Tout va donc reposer sur les prochaines élections législatives qui doivent se dérouler le 15 mai 2022 ?
X.B.: Oui, sauf qu'elles se trouvent en pointillés comme d'habitude au Liban. Nous craignons toujours qu'un incident quelconque conduise au report des élections. C'est donc un gros point d'interrogation. Reste que le seul espoir, bien frêle, c'est la société civile et son vote qui peut tout changer.
Comment le Liban, rappelons qu'il est en faillite depuis mars 2020, peut se relever ?
X.B.: Remonter l'économie du Liban c'est avant tout bien utiliser les finances du pays. Donc ne plus distribuer des prébendes comme c'est le cas actuellement ou faire fructifier son argent à l'étranger. Il faut l'investir dans l'outil productif, pour l'immédiat dans les médias, l'industrie et l'agriculture, et les entreprises repartiront.
Vous avez donc confiance dans l'avenir de ce pays?
X.B.: J'ai totalement confiance dans les Libanais. Mais aujourd'hui, ils n'ont pas d'argent, ils ne peuvent pas travailler, leur personnel se trouve au chômage, mais ils savent faire. Je suis donc confiant sur la qualité des Libanais, mais pas sur la date de départ de la classe politique actuelle.
X.B.: Oui, sauf qu'elles se trouvent en pointillés comme d'habitude au Liban. Nous craignons toujours qu'un incident quelconque conduise au report des élections. C'est donc un gros point d'interrogation. Reste que le seul espoir, bien frêle, c'est la société civile et son vote qui peut tout changer.
Comment le Liban, rappelons qu'il est en faillite depuis mars 2020, peut se relever ?
X.B.: Remonter l'économie du Liban c'est avant tout bien utiliser les finances du pays. Donc ne plus distribuer des prébendes comme c'est le cas actuellement ou faire fructifier son argent à l'étranger. Il faut l'investir dans l'outil productif, pour l'immédiat dans les médias, l'industrie et l'agriculture, et les entreprises repartiront.
Vous avez donc confiance dans l'avenir de ce pays?
X.B.: J'ai totalement confiance dans les Libanais. Mais aujourd'hui, ils n'ont pas d'argent, ils ne peuvent pas travailler, leur personnel se trouve au chômage, mais ils savent faire. Je suis donc confiant sur la qualité des Libanais, mais pas sur la date de départ de la classe politique actuelle.