Les Maltais redonnent leur confiance au Parti travailliste

MALTE. Le camp du chef du gouvernement Robert Abela a emporté, samedi 26 mars 2022, les élections législatives à Malte avec 55,1% des voix. Le Partit laburista (Parti travailliste) conserve donc le pouvoir qu'il détient depuis neuf ans. Ce scrutin, le premier depuis les scandales politico-judiciaires qui ont frappé l'île méditerranéenne, avait valeur de test.
 
Robert Abela a pris la tête du gouvernement en janvier 2020 pour remplacer au pied levé Joseph Muscat. Poussé à la démission et lâché par plusieurs de ses ministres, ce dernier, membre éminent du Parti travailliste, est accusé de corruption et d'entraves à la justice dans l'affaire de l'assassinat de la journaliste Daphne Caruana Galizia en octobre 2017. Le Parlement européen avait en décembre 2019 voté une résolution indiquant que "tant que le Premier ministre maltais restera au pouvoir, il persistera un risque sérieux d'entrave des enquêtes en cours". Les députés évoquaient une "menace sérieuse et persistante sur l'état de droit, la démocratie et les droits fondamentaux" et leur 'inquiétude quant à la liberté des médias, l'indépendance de la police et de la justice, la liberté de réunion et la séparation des pouvoirs.

Leur vigilance va être désormais d'autant plus accrue que Roberta Metsola, la nouvelle présidente du Parlement européen - élue en janvier 2022 pour succéder à David Sassoli, décédé dans la nuit du 10 au 11 janvier 2022 à quelques jours de l'élection - est du Parti nazzjonalista (Parti nationaliste), le parti d'opposition.

Les Nationalistes n'ont pas réussi à s'imposer pour assurer une alternance. Sans attendre les résultats définitifs intervenus lundi 28 mars 2022, leur numéro un, Bernard Grech, a reconnu sa défaite (41,7% des bulletins) lors d'un appel téléphonique à son adversaire. Roberta Metsola a affirmé publiquement, samedi 26 mars 2022, son soutien à son collègue. Elle a affirmé qu'elle n'abandonnerait pas son poste à Bruxelles de sitôt malgré des appels de pied du président adjoint du Parti nationaliste, Robert Arrigo, lançant un significatif: "Aidez-nous Roberta" sur son compte twitter dès les résultats des législatives connus. Des élections vont se dérouler pour la présidence de ce parti, comme après chaque défaite, et Bernard Grech a d'ores et déjà annoncé qu'il se présenterait. Interrogée par le journal Malta Today sur la possibilité qu'elle prennent la tête du Parti nationaliste, Roberta Metsola a botté en touche. Elle s'est contentée d'indiquer qu'elle jouerait son rôle sur la scène politique locale en représentant Malte au niveau européen.

Ces législatives ont cependant montré le peu d'entrain, tout relatif par rapport aux autres pays européens, des Maltais à se rendre aux urnes. Selon la Commission électorale, La participation n'a été "que" de 85,5%. Il s'agit du plus bas taux relevé depuis 1955, alors qu'il a toujours dépassé les 90% depuis 1966 (92% en 2017 lors des dernières législatives) dans cette ancienne colonie britannique indépendante depuis 1964. Une baisse d'autant plus significative que les Maltais âgés de seize à dix-huit ans pouvaient, pour la première fois, voter dans un scrutin national.

"Les gens nous ont fait confiance pour faire avancer le pays et nous devons leur rendre la pareil avec humilité", soulignait d'ailleurs, dimanche 27 mars 2022, le chef du gouvernement reconduit en revendiquant sa victoire. "A ceux qui n'étaient pas sûrs de devoir nous faire confiance, je vous promets que nous travaillerons plus dur pour vous convaincre et nous ne tolérerons aucune arrogance."
Robert Abela entend offrir une meilleure qualité de vie, de meilleurs opportunités pour tous et une "Malte plus belle".

Membre du Parti travailliste, mais n'ayant pas été ministre de Joseph Muscat, il se démarque de son prédécesseur depuis sa prise de fonction. Il a notamment promulgué des réformes pour démocratiser les institutions. Le Premier ministre ne nomme ainsi plus les juges et le chef de la police. De même, il a renforcé la liberté de la presse.
 
Malte, et le parti travailliste, tente de sortir d'une période noire qui n'en finit pas. Le pays a été placé en 2021 sur une liste grise du Groupe d'action financière (GAFI - FATF), un organisme intergouvernemental basé à Paris, à cause de son exposition au blanchiment d'argent et au financement du terrorisme. Robert Abela doit aussi tenter d'effacer son image de paradis fiscal. Le système de passeports dorés (accordant la citoyenneté à de riches investisseurs) se trouve encore en cours. S'il a été, récemment, suspendu pour les citoyens russes et biélorusses depuis l'invasion de l'Ukraine, le programme se poursuit pour les autres nationalités. Et ce, malgré les appels répétés, encore le 28 mars 2022, du Parlement européen pour mettre fin à cette pratique dans toute l'Union européenne.

Trois ONG ont également accusé, en janvier 2022, l'île de "complicité de crimes contre l'humanité" pour sa gestion de la crise des réfugiés libyens.
 
Pour contre-balancer tout cela, Robert Abela s'est appuyé dans sa campagne sur sa bonne gestion de la crise sanitaire (200 M€ versés pour compenser les conséquences économiques et 200 M€ supplémentaires promis).

Le tout doublé d'un bon bilan économique avec un PIB en progression de 9% en 2021. Son programme électoral ambitieux comportait 1 000 propositions. "Travaillons ensemble pour les transformer en autant de réalisations", soulignait-il.
 
État membre depuis 2004, Malte est à la fois le plus petit pays de l'Union européenne et le plus peuplé en densité avec 516 000 habitants (dont 340 552 votants inscrits lors de ces législatives) pour 316 km². L'économie de l'île méditerranéenne est basée sur le tourisme, les services financiers et les jeux en ligne.