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Le prix de la monarchie espagnole


Rédigé par , le Vendredi 20 Juin 2014 - Lu 4111 fois

Après l'abdication de son père Juan Carlos I, le nouveau roi Philippe VI d'Espagne hérite d'une couronne que certaines voix (il est vrai très minoritaires) se permettent de contester pour la première fois depuis l'adoption de la Constitution en 1978, et la reconnaissance officielle du roi comme chef de l’État espagnol. Le nouveau monarque sait donc qu'il doit faire un effort de transparence pour asseoir sa légitimité. Et dans un pays toujours en crise économique, la question du coût de la monarchie demeure l'un des points sensibles.


Défilé en l'honneur du nouveau roi Philippe VI d'Espagne (photo Casa Real)
Défilé en l'honneur du nouveau roi Philippe VI d'Espagne (photo Casa Real)
ESPAGNE. Plus que toute autre institution en Espagne, la monarchie se veut d'abord un symbole. Symbole d'une transition démocratique lorsque Francisco Franco choisit de placer Juan Carlos sur le trône, et d'en faire le personnage clé du passage de la dictature à la démocratie à la mort du Caudillo en 1975. De ce processus naîtra la Constitution espagnole de 1978.

Symbole aussi de la stabilité démocratique, lorsque le monarque prend parti pour le Droit constitutionnel lors de la tentative de coup d’État du colonel Tejero en 1981. Symbole d'un pays en crise, pas seulement économique, lorsque Juan Carlos est "surpris" dans une indécente chasse à l'éléphant dont il s’excusera devant les caméras, et surtout lorsqu'un juge décide en 2011 de mettre en examen Iñaki Urdangarin, son gendre, sous prétexte de malversations. Un scandale qui menace aujourd'hui la fille de Juan Carlos, Christine, sœur du nouveau roi Philippe VI d'Espagne.

Le nouveau roi sait évidemment toute la valeur de ces symboles, et son arrivée à la Zarzuela (maison royale) en témoigne. Le jeune roi de quarante-six ans a d'abord inauguré un nouveau blason royal, d'où disparaissent « le joug et les flèches », symbole du franquisme. Le nouveau monarque a aussi décidé de se dispenser de cérémonie religieuse lors de la passation de couronne, ce qui n'est pas anodin au pays de l'Opus Dei. Philippe VI a également décrit dans son discours d'intronisation « une Espagne plurielle où chacun a sa place », prenant ainsi en considération les exclus de la crise économique et au-delà ceux qui sont séduits par les mouvements indépendantistes, en Catalogne et ailleurs.

Profil bas

Passation de pouvoirs entre le père Juan Carlos et son fils Philippe (photo Casa Real)
Passation de pouvoirs entre le père Juan Carlos et son fils Philippe (photo Casa Real)
En somme, Philippe VI d'Espagne a pris le parti d'un « profil bas » qui convient assez à son image consensuelle, en accord avec la politique de transparence et de modération entamée par son père. Juan Carlos avait en effet déjà commencé à répondre à une question que des Espagnols de plus en plus nombreux se posent, sur fond de drapeaux républicains : combien coûte la maison royale ?

A priori, il suffit d'aller sur le site de la Zarzuela, où l'on apprend que « Sa Majesté a reçu en 2014 un budget de l'État de 7 775 040 € nécessaire au maintien de la famille de la maison royale ». La précision du chiffre témoigne de la volonté de transparence de la maison royale, qui ne manque pas de rappeler que ce budget a baissé de 2 % par rapport à 2013. En cumulant toutes les baisses enregistrées depuis 2010, les ressources officielles de la Couronne espagnole octroyées par l’État sont aujourd'hui inférieures à celles de 2006 (plus de 8 M€ par an à l'époque).

La famille héritière des Bourbon a également fait un effort de clarification à la fin du règne de Juan Carlos qui avait décidé, un an avant son abdication, d'octroyer un salaire annuel de 63 234 € à sa femme, la reine Sofia. Des émoluments qui étaient auparavant noyés dans les "frais généraux de représentation".

Le roi Juan Carlos avait également précisément déterminé son propre salaire : 140 000 € bruts par an, plus 152 000 € en frais de représentation. C'est donc à ce régime que seront soumis désormais le nouveau roi Philippe VI d'Espagne et la reine Lætitia. Le monarque déduira ces rétributions d'une enveloppe globale de 461 000 € par an à répartir entre les différents salaires de toute la famille royale (ce sont ces sommes qui servent de base au calcul de l’impôt sur le revenu).

Côtés obscurs

Le roi Philippe VI d'Espagne et la reine Lætitia lors du discours d'intronisation au Parlement espagnol (photo Casa Real)
Le roi Philippe VI d'Espagne et la reine Lætitia lors du discours d'intronisation au Parlement espagnol (photo Casa Real)
Finalement, la charge de la royauté espagnole n’apparaît pas si lourde en comparaison de la monarchie britannique (qui coûte près de 40 M€ par an à l’État) ou de la Couronne belge (environ 34 M€ par an). Il n'en reste pas moins des côtés obscurs dans les comptes de la Zarzuela, par exemple le patrimoine personnel de l'ancien roi Juan Carlos, puisque la loi ne l'oblige pas à le déclarer.

Impossible également de connaître le détail des coûts liés aux voyages et activités privées de la famille royale. L'enveloppe de 7,7 M€ allouée chaque année aux Bourbons espagnols reste donc assez opaque. Par ailleurs, il faut préciser que les dépenses liées à la charge du roi comme chef d’État sont assumées directement par le gouvernement espagnol : les voyages officiels sont financés par le ministère des Affaires étrangères, la sécurité du chef de l'État revient au ministère de l'Intérieur, le coût de la garde royale est puisé dans les caisses du ministère de la Défense, l'entretien des palais et des monuments royaux est payé par le service du Patrimoine national, et la gestion du parc des véhicules officiels de la maison royale dépend de son côté du ministère des Finances.

Une loi de transparence est à l'étude pour que les ministères publics puissent faire la part de toutes ces dépenses, qui alourdissent évidemment considérablement la « note ». Mais du côté du Parlement, le nouveau roi Philippe VI n'a guère de souci à se faire, puisque la majorité des députés espagnols (c'est à dire les représentants du Parti Populaire et du Parti Socialiste) sont de fervents défenseurs de la monarchie constitutionnelle.




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