
Econostrum.info : Pourquoi avez-vous été arrêté ?
Kostas Vaxevanis : Les autorités politiques et la justice au lieu d’arrêter les fraudeurs ou les ministres, qui se sont rendus coupables pour avoir caché cette liste sans l’utiliser, répriment à la place la vérité et les journalistes.
J’ai devant moi le pouvoir, un pouvoir corrompu qui fonctionne comme une mafia et j’y fais face.
Econostrum.info : Vous attendiez-vous à cette réaction ?
Kostas Vaxevanis : Je m’attendais bien sûr à des réactions, mais je ne m’attendais pas à ce qu’une chasse à l’homme soit déclenchée, que des dizaines de policiers me suivent et surveillent les endroits que je fréquente. D’autant que cette opération s'appuyait uniquement sur un ordre verbal du procureur et sans aucune prise de position du gouvernement ou de l’État grec sur ce qui se passe, à savoir la publication d’une liste authentique de grands fraudeurs fiscaux qui existe depuis longtemps, mais gardée cachée pour protéger ceux qui y sont mentionnés.
Une liste que deux ministres des finances ont déclaré au parlement avoir perdue (ndlr : Georges Papaconstantinou et Evangelos Venizelos) et qu'un troisième, l'actuel (ndlr: Giannis Stournaras), a publiquement déclaré qu'il allait la redemander à la France, car Christine Lagarde, alors ministre des Finances, l’avait remise à la Grèce. Ils devraient me remercier, je l'ai retrouvée pour eux !
Econostrum.info : Pour quelle raison le gouvernement n'a pas utilisé cette liste ?
Kostas Vaxevanis : Beaucoup de personnes dans cette liste sont des amis du pouvoir, de députés et des ministres. En lisant ces noms, nous comprenons pourquoi la justice et les organes de l'État se sont abstenus de réagir tout ce temps.
"Aucun délit"
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Econostrum.info : Sur quoi reposait le chef d'accusation ?
Kostas Vaxevanis : Le chef d’accusation est un délit. Mais, ce que je trouve terrible c’est que le procureur d’Athènes, qui m’a appliqué la procédure des flagrants délits pour violation de la loi sur la protection des données personnelles, n’ait pas jugé utile de déclencher cette même procédure pour le plus grand journal du pays, Ta Nea qui publiait voici un mois une liste d’artistes grecs avec leurs déclarations fiscales à l’appui. Ce qui, pour le coup, concernait vraiment des données personnelles.
Econostrum.info : Que répondez-vous à cette accusation ?
Kostas Vaxevanis : Nous n’avons commis aucun délit ! Vu le climat crée par la non-publication de cette liste, dont tout le monde connaissait l'existence, la publier répondait à l’intérêt public.
Fini les mensonges, maintenant ils doivent dire comment ils vont contrôler les détenteurs de ces comptes en Suisse. Bien évidemment, disposer d'un compte en Suisse ne veut pas dire être fraudeur, ça nous l’avons précisé dans l’article publié avec la liste.
Nous publions aujourd’hui dans Hot Doc des interviews de personnes citées dans cette liste qui nous soutiennent.
Cela devrait faire réfléchir les autorités.
2 milliards d'euros sur la liste Lagarde
Econostrum.info : N’est-ce pas dangereux tout de même de publier ainsi des noms ?
Kostas Vaxevanis : Publier des noms de femmes prostituées séropositives comme l'a fait la police relayée par les médias est dangereux, oui, et illégal, et ça ne sert à rien.
Pourtant, je n'ai constaté aucune suite juridique !
Si des salariés gagnant une misère se trouvent imposés au-delà de la limite de la pauvreté et qu'ils payent alors que d'autres vident leurs comptes vers l'étranger sans payer de taxes, ça ce n'est pas un délit ? Surtout dans la situation actuelle du pays?
Econostrum.info : Combien d’argent a quitté le pays ces dernières années, le savez-vous ?
Kostas Vaxevanis : La question n’est pas de savoir combien d’argent est parti. La question est de savoir si cet argent a quitté le pays légalement et si les taxes ont été payées.
C'est ce qu'aurait dû faire le gouvernement au moment même ou cette liste lui a été remise.
D'après mon enquête, nous estimons à 2 milliards d'euros les montants totalisés par la liste Lagarde. Il n'est pas exclu qu'une bonne partie de cet argent ait été déplacé depuis dans d'autres banques.
C'est pourquoi, je pense que ces ministres des Finances, qui ont menti au peuple grec, devraient se trouver devant les tribunaux.
Econostrum.info : Cette poursuite est une poursuite personnelle, ou pensez-vous que la liberté de la presse se trouve en danger en Grèce ?
Kostas Vaxevanis : Hot Doc est un journal d'investigation. Et le journalisme d'investigation gêne, il doit disparaître.
Mais il existe une nouvelle forme de censure en Grèce. Plus aussi franche que du temps des colonels où ils interdisaient d'écrire contre l’intérêt national. L’État décidant ce qui définissait l’intérêt national. Maintenant, j'entends parler de la protection de données personnelles. Ceci s'avère plus pervers et tout aussi dangereux pour la liberté de la presse.