La logistique urbaine sens dessus dessous

MÉDITERRANÉE.  « Les centres de distribution urbains suscitent souvent des espoirs et en même temps des craintes démesurées de la part des transporteurs. Il ne faut écarter aucune piste y compris l’utilisation des sous-sols.  La mixité fonctionnelle au sein d’un même bâtiment demeure tout à fait possible et viable, mais, le coût du foncier reste le nerf de la guerre. C’est d’ailleurs une des raisons qui pourrait conduire à l’émergence d’hôtels logistiques et de bâtiments mixtes d’activités », explique Isabelle Bardin, directrice du Cluster Paca Logistique qui accueillait mardi 9 décembre 2014 à Marseille quelque 170 experts en logistique autour du thème de la ville durable.   

Au Maroc, la logistique des grands flux demeure encore axée sur les centres villes, c’est la raison pour laquelle l’Etat, aux côtés de l’Agence marocaine du développement de la logistique (AMDL),  s’attache à promouvoir des plates-formes en périphérie de la ville aux standards internationaux. « Nous travaillons à la fois sur la structuration de la grande logistique qui doit clairement sortir de la ville et sur la distribution urbaine. Nous devons apporter des réponses en terme de circulation des poids lourds et sommes en train d’élaborer un guide national sur la logistique urbaine afin de prendre les bonnes décisions car bien souvent l’improvisation prend le pas sur la concertation », explique Younes Tazi, directeur général de l’AMDL dont l’ambition porte sur l’aménagement de 3 300 ha de zones logistiques d’ici 2030.  

Plus au nord, la ville de Lyon expérimente, rue de Grenette, le partage des espaces avec des horaires autorisés pour les camions entre 9h30 et 16h30. « Nous espérons également travailler sur les livraisons nocturnes testées de juin 2014 au printemps 2015. Nous souhaitons généraliser cette pratique sur le territoire. Nous travaillons aussi sur la mixité fonctionnelle. Pourquoi ne pas permettre aux camions de livraisons d’emprunter les couloirs de bus ? », suggère Diana Diziain, chargée de mission transports de marchandises et logistique à la Communauté urbaine de Lyon.
 

A compter du 2 février 2015, le concept de distribution urbaine de la société City Logistics entrera en vigueur à Lyon. L’entreprise a ainsi noué des accords avec une quinzaine de messagers pour assurer la livraison en ville depuis son entrepôt de 5 000 m² au sud de Lyon au moyen de véhicules électriques et au gaz. « Nous visons les 700 positions par jour », explique Frédéric Vial, directeur général de City Logistics.

L’entreprise, qui entend devenir partenaire et relai des messagers, leur a même ouvert son capital. Seul bémol, les surcoûts des véhicules visiblement sous estimés et la faible autonomie pour l’électrique (80km).

City Logistics souhaiterait le déploiement par la Communauté urbaine de « trois à quatre espaces de logistique urbaine de 300 à 500 m² de superficie » mais, pour l’heure, seuls des espaces souterrains auraient été proposés.

L’architecte Monique Labbé croit fermement au potentiel des sous-sols en particulier pour des développements dans la logistique. Elle intervient sur le projet de recherche appliquée baptisé « Ville 10D- Ville d’idées » portant sur la sur la contribution du sous-sol au développement urbain durable. Ce projet intègre à la fois les dimensions socioéconomiques, environnementales, sociétale et juridiques. « Ville d’idées »  a pour ambition d’améliorer la connaissance sur la ressource sous-sol et de montrer qu’il existe une alternative crédible au seul aménagement de la surface.
 

Bilbao, la ville industrieuse métamorphosée en joyau du Basque depuis l’installation du Musée Guggenheim, il y a 25 ans, expérimente de nouvelles approches de distribution urbaine des marchandises. « Des voies multiusages, des horaires de livraisons et un système de réservation d’un espace temporaire  pour  décharger le fret ont été introduit dans le cadre du projet européen Freilot déployé de 2009 à 2011. Nous avons constaté que les transporteurs ne réservaient pas. En mars 2014, nous avons introduit un système plus simple avec des disques horaires en carton. Les livraisons sont autorisées de 8 h à 14 h pour une durée de 30 mn maximum. Les amendes se stationnement ont également augmenté passant de 50 à 200 € », a détaillé Garoa Lekuona, chargée de projet innovation au sein du cluster mobilité et logistique à Bilbao.