
La création le 18 février 2011 de la Commission nationale d'investigation sur la corruption et la malversation (CNICM) va permettre de punir les coupables. Numéro vert, publicité à la télévision pour inciter les Tunisiens à déposer des plaintes, la CNICM n'a pas hésité à ouvrir large ses portes. Et elle a été servie ! Dès les premiers jours, la Commission a reçu maintes plaintes qui permettent aujourd'hui de révéler au grand jour et en détail ce qui se murmurait tout bas sous l'ancien régime.
Composée principalement de juristes, spécialistes en finance et en audit et contrôle des entreprises, experts comptables, avocats et magistrats, la CNICM a recensé dix mille requêtes déposées par des plaignants et en a déjà examiné la moitié.
320 dossiers se trouvent aujourd'hui instruits par la justice. Elle a déjà mené plus de 120 audiences dont certaines ont été filmées et seront conservées aux Archives nationales.
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Le clan Ben Ali en filigrane du rapport
Un sésame qui a permis de s'approprier une bonne partie de l'économie tunisienne avec des méthodes diverses : mise en place de sociétés-écran, participations forcées dans le capital d'entreprises privées pour en toucher les dividendes, octrois de permis de vente de boissons alcoolisées, fraudes à l'export de ciment, appels d'offres publics truqués. Sans compter le favoritisme dans l'orientation universitaire et les biens immobiliers accaparés, terres ou villas. Jusqu'au Palais de Sidi Dhrif, construit sur un terrain exproprié illégalement par l'ancien président. Le réaménagement de ce terrain a coûté au ministère de la Défense nationale une perte de 4 millions de dinars (2 M€).
Et une mention toute particulière à la belle famille Trabelsi, très impliquée dans cette délinquance, à l'image d'Imed Trabelsi, neveu de l'épouse de Zine El-Abidine Ben Ali qui a porté au paroxysme l'entregent de ses liens familiaux avec une spécialité dans le trafic de voitures. Ou Mohamed Trabelsi qui fait prendre en charge pour une hospitalisation à Marseille ou à Neuilly le transport et les soins de plusieurs membres de sa famille par diverses associations avec accord de la Caisse Nationale d'assurance maladie tunisienne. Y compris les frais des accompagnants.
Et encore BelhassenTrabelsi et Sakhr El Materi qui accaparent des terrains pour les revendre ou y bâtir des mégaprojets tels la banque Zitouna, les dépôts de voitures de la société Ennakl à La Goulette en plus d’autres propriétés, sociétés et des quartiers en entier. Belhassen Trabelsi obtenait d'ailleurs, tout comme d'autres membres de sa famille, de conséquents prêts bancaires sans fournir de garanties autres que son nom auprès de plusieurs banques (Banque de l'Habitat, Banque Nationale agricole, Société tunisienne de banque...).
D'autres, vingt-cinq poursuivis aujourd'hui par la justice tunisienne, faisaient dans le transfert illégal de devises. Si certains noms émergent, Sakhr El Materi, gendre de l'ex-président, Mongi Safra, Belhassen Trabelsi et Imed Trabelsi figurent en toutes lettres, d'autres sont masqués derrière des initiales souvent facilement déchiffrables à l'aide des détails publiés.
Des Tunisiens et même des étrangers épinglés
Selon Néji Baccouche, membre de la commission technique de la CNICM, la corruption en Tunisie a affecté tous les secteurs et domaines sans exception, y compris les biens immobiliers, les banques, les marchés publics, les télécommunications, l'information, les sites archéologiques, les megas-projets et la Douane. Les banques, notamment publiques, ont dû renoncer à des dettes impayées sur injonction de la Banque centrale de Tunisie.
Derrière cette corruption se trouvent des politiques, dont des ministres de Ben Ali, mais aussi des journalistes et même des étrangers. Les membres de la Commission auraient d'ailleurs subi d’énormes pressions de la part de certaines personnes accusées.
Le rapport donne des détails sur les objets et sommes d'argent découverts dans le Palais présidentiel de Carthage et celui de Sidi Dhrif. "Des millions d'euros et de dollars et des colliers de diamant et d'or ont été trouvés dans des caches installées derrière les rideaux du palais de Sidi Bou SaId ou construites derrière une fausse bibliothèque" précise la CNICM.
Le cas de l'Agence tunisienne de la communication étrangère (ATCE) est épluché. Son rôle : servir les intérêts du pouvoir par le biais de financements à la presse et à des organismes de communication et de publicité. Des journalistes tunisiens et étrangers auraient ainsi reçu des sommes d'argent.
Lire le rapport complet de la CNICM (en arabe)
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