
Mohamed Boukhari tente au quotidien d'aider les entreprises à trouver leur chemin dans le dédale de la complexité administrative algérienne (photo : F.Dubessy)
ALGÉRIE. "Malgré ses difficultés, l'Algérie reste une priorité pour les Pme de notre région avec beaucoup d'opportunités même si les Chinois nous ont pris la première place et que les Américains ne sont pas loin", note Jean-Pierre de Bono. Président du Club d'affaires pour le développement des entreprises françaises en Algérie (Cadefa), il appelle "la diaspora algérienne à reprendre confiance en son pays. C'est un premier pas nécessaire."
L'ensemble des intervenants de la conférence organisée, jeudi 9 mars 2017 à Marseille par Finances et Conseil Méditerranée (FCM), ont regretté que la loi de Finances 2017 n'ait pas mis fin aux subventions et que, comme l'indique Jean-Pierre de Bono, "la sphère informelle joue toujours un rôle important".
Comme le reconnait Mohamed Boukhari, expert-comptable à Annaba et Alger, "50% de la liquidité n'est pas dans le système bancaire mais dans l'informel. Ceci pose problème même si le gouvernement a mis en place un système de conformité fiscale volontaire en 2016 permettant de "blanchir" cet argent contre une taxe de 7%. Malgré le peu d'engouement pour cette mesure, ceci sera poursuivi en 2017", précise-t-il.
Tous ont cependant mis l'accent sur les réformes actuelles, qui, si elles demeurent timorées, vont néanmoins dans le bon sens.
Christian Apothéloz, délégué général de FCM, entendait lors de cette manifestation démontrer aux chefs d'entreprises provençaux les "nouvelles règles du jeu" qui pourraient bien favoriser les échanges entre les Pme et l'Algérie.
L'ensemble des intervenants de la conférence organisée, jeudi 9 mars 2017 à Marseille par Finances et Conseil Méditerranée (FCM), ont regretté que la loi de Finances 2017 n'ait pas mis fin aux subventions et que, comme l'indique Jean-Pierre de Bono, "la sphère informelle joue toujours un rôle important".
Comme le reconnait Mohamed Boukhari, expert-comptable à Annaba et Alger, "50% de la liquidité n'est pas dans le système bancaire mais dans l'informel. Ceci pose problème même si le gouvernement a mis en place un système de conformité fiscale volontaire en 2016 permettant de "blanchir" cet argent contre une taxe de 7%. Malgré le peu d'engouement pour cette mesure, ceci sera poursuivi en 2017", précise-t-il.
Tous ont cependant mis l'accent sur les réformes actuelles, qui, si elles demeurent timorées, vont néanmoins dans le bon sens.
Christian Apothéloz, délégué général de FCM, entendait lors de cette manifestation démontrer aux chefs d'entreprises provençaux les "nouvelles règles du jeu" qui pourraient bien favoriser les échanges entre les Pme et l'Algérie.
La part de l'industrie dans le PIB ne cesse de décliner
Pour Raouf Boucekkine, économiste et directeur de l'institut d'études avancées IMéRA (Aix Marseille Université), l'économie algérienne doit absorber le choc pétrolier qui a vu le baril passé de 110$ à moins de 50$ de juin à décembre 2014. "La moitié des revenus s'évapore. A 60$, la chute des revenus fiscaux pétroliers se trouve de l'ordre de 20 mrds$. Les réserves fondent", indique-t-il pointant six excès de l'économie algérienne avant le choc pétrolier. D'abord des dépenses courantes hors normes d'un Etat providence employeur en premier ressort. "Une politique d'une inefficacité et d'une inefficience criantes. Ceci ne profite qu'aux plus riches", souligne l'économiste qui précise que "les transferts sociaux représentent alors 17% du PIB. Et encore, qu'en comptant les subventions explicites."
Second point justement, ces "insoutenables subventions implicites". Celles non incluses dans le budget comme les subventions énergétiques (gaz, électricité, carburant) qui ont atteint les 1975 mrds de dinars (16 mrds€) en 2012 soit 13% du PIB.
Vient ensuite la situation d'un secteur manufacturier en berne. "Depuis le début des années 80 la part de l'industrie dans le PIB n'a cessé de décliner. Elle est passée de 20% à moins de 5% en 2011", démontre Raouf Boucekkine. D'où une sous-industrialisation de quatre points inférieure aux autres pays pétroliers en pourcentage de PIB.
Quatrième excès, la folle envolée des importations qui ont doublées en dix ans. "Ceci menace la souveraineté de l'Algérie. Avec une telle balance des paiements, le pays va perdre toutes ses réserves et va donc devoir emprunter", prévient l'économiste qualifiant ces importations de "destructrices de l'industrie nationale car elles ont pris la place de la production nationale."
L'Algérie exporterait trois fois moins que la Tunisie, le Maroc et l'Egypte.
Cinquième dysfonctionnement, "le modèle de croissance obsolète qui ne voit que 10% des investissements assurés par le privé alors que les revenus de l'Etat sont taris."
Enfin, Raouf Boucekkine se désole de l'instabilité législative en prenant comme exemple les IDE (Investissements directs de l'étranger) qui sont tantôt ouverts, tantôt fermés.
Second point justement, ces "insoutenables subventions implicites". Celles non incluses dans le budget comme les subventions énergétiques (gaz, électricité, carburant) qui ont atteint les 1975 mrds de dinars (16 mrds€) en 2012 soit 13% du PIB.
Vient ensuite la situation d'un secteur manufacturier en berne. "Depuis le début des années 80 la part de l'industrie dans le PIB n'a cessé de décliner. Elle est passée de 20% à moins de 5% en 2011", démontre Raouf Boucekkine. D'où une sous-industrialisation de quatre points inférieure aux autres pays pétroliers en pourcentage de PIB.
Quatrième excès, la folle envolée des importations qui ont doublées en dix ans. "Ceci menace la souveraineté de l'Algérie. Avec une telle balance des paiements, le pays va perdre toutes ses réserves et va donc devoir emprunter", prévient l'économiste qualifiant ces importations de "destructrices de l'industrie nationale car elles ont pris la place de la production nationale."
L'Algérie exporterait trois fois moins que la Tunisie, le Maroc et l'Egypte.
Cinquième dysfonctionnement, "le modèle de croissance obsolète qui ne voit que 10% des investissements assurés par le privé alors que les revenus de l'Etat sont taris."
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Baisse nette des importations
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Après ces constats, l'économiste, conseiller du gouvernement algérien, prône des mesures urgentes. "Le système d'avant le choc n'était pas viable, il faut donc réformer d'autant plus qu'un trou d'air est prévu en 2017/2018." Il préconise d'éviter la sur-exploitation du sous-sol car elle serait irrationnelle à court terme vu le niveaux des prix actuel des hydrocarbures. De même, alors que la Banque d'Algérie se trouve sous pression, il ne recommande pas la planche à billet. "Nous sommes déjà un pays inflationniste." Raouf Boucekkine soutient en revanche "la réduction des importations de façon brutale", à condition qu'elle ne s'effectue pas "n'importe comment pour éviter le chômage de masse et menacer la stabilité dans une population très jeune."
Les premiers résultats des mesures d'urgence du gouvernement semblent déjà positifs. La baisse des importations serait tangible avec 46,7 mrds$ d'importations en 2016 contre 58,6 mrds$ en 2015. Et un objectif de 35 mrds$ en 2017.
De même, la politique de substitutions aux importations - avec notamment le développement de minoteries et de cimenterie - et la réduction graduelle des subventions implicites (augmentation du prix de l'essence et baisse de la consommation) portent leurs fruits. "Pour éviter l'endettement extérieur, le gouvernement a fait appel à l'épargne nationale en lançant en 2016 un emprunt qui a permis de récolter 500 milliards de dinars", se félicite également l'économiste.
Les premiers résultats des mesures d'urgence du gouvernement semblent déjà positifs. La baisse des importations serait tangible avec 46,7 mrds$ d'importations en 2016 contre 58,6 mrds$ en 2015. Et un objectif de 35 mrds$ en 2017.
De même, la politique de substitutions aux importations - avec notamment le développement de minoteries et de cimenterie - et la réduction graduelle des subventions implicites (augmentation du prix de l'essence et baisse de la consommation) portent leurs fruits. "Pour éviter l'endettement extérieur, le gouvernement a fait appel à l'épargne nationale en lançant en 2016 un emprunt qui a permis de récolter 500 milliards de dinars", se félicite également l'économiste.
Réformer le système bancaire
Concluant que "l'économie algérienne est bien résiliente", il note le taux de croissance de 3,5% en 2016. "Une belle surprise !", lance-t-il. Tout n'est pas gagné cependant. "La baisse des importations a causé une chute brutale des services marchands et les banques, qui croulaient sous les liquidités et se contentaient d'encaisser l'argent de la Sonatrach, doivent désormais faire avec des liquidités en berne de moins de 1 000 milliards de dinars à fin 2016. Ce qui est très peu. L'Algérie va redécouvrir la politique monétaire."
Raouf Boucekkine suggère une nouvelles gouvernance économique. "Il faut fixer des cibles chiffrées à courte terme (trois ans) et/ou à moyen terme à l'horizon 2030. Sans se tromper de cibles !" Selon lui, "les marchés souffrent encore de graves dysfonctionnement et la régulation peine encore à s'imposer. Ce ne sont pas, malheureusement, les marchés qui vont identifier les avantages comparatifs de l'économie nationale et poser les bonnes incitations. Il demeure donc important que l'Etat joue un rôle prééminent durant cette transition car l'économie reste convalescente." Il en appelle à une réforme du système bancaire urgente ainsi qu'à un développement des marchés financiers. "Les PPP (ndlr : Partenariats public privé) vont arriver et le financement participatif sous forme de sukuk (ndlr : "obligations" de la finance islamique) sera lancé dans les prochaines semaines", dévoile-t-il.
Lire aussi :"La rente pétrolière a nourri à peu près toutes les dérives de l'économie algérienne"
Raouf Boucekkine suggère une nouvelles gouvernance économique. "Il faut fixer des cibles chiffrées à courte terme (trois ans) et/ou à moyen terme à l'horizon 2030. Sans se tromper de cibles !" Selon lui, "les marchés souffrent encore de graves dysfonctionnement et la régulation peine encore à s'imposer. Ce ne sont pas, malheureusement, les marchés qui vont identifier les avantages comparatifs de l'économie nationale et poser les bonnes incitations. Il demeure donc important que l'Etat joue un rôle prééminent durant cette transition car l'économie reste convalescente." Il en appelle à une réforme du système bancaire urgente ainsi qu'à un développement des marchés financiers. "Les PPP (ndlr : Partenariats public privé) vont arriver et le financement participatif sous forme de sukuk (ndlr : "obligations" de la finance islamique) sera lancé dans les prochaines semaines", dévoile-t-il.
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